EL TEMPS DE LA MEMÒRIA

TRESORS DEL MUSEU D’ARQUEOLOGIA DE CATALUNYA A GIRONA

Pierre d’dautel

Pierre d’dautel

Marbre

IIIe-IIe sièlce av. J-C

Mas Castellar (Pontós - Alt Empordà)

La pierre d’autel de Mas Castellar est un objet exceptionnel dans le monde ibérique et, sans aucun doute, l’un des trésors les plus précieux de notre musée.

Élaborée en marbre du Pentélique, elle provient d’Athènes et a été retrouvé cassée in situ dans une pièce de l’une des maisons du peuplement ibérique de Mas Castellar, à Pontós (Alt Empordà). Elle a été datée à cheval entre le IIIe et le IIe siècle av. J.-C. La pièce où elle a été trouvée a été interprétée comme un espace cultuel, avec un grand foyer central, au bord duquel se trouvait la pierre, quatre plus petites dans différents endroits de la pièce, et une fosse très bien élaborée, destinée à contenir de l’eau. Associé à l’un des foyers, une grande quantité d’ossements de chiens, certains portant des traces de décharnement. C’est la raison pour laquelle on a considéré cet endroit comme un lieu où se déroulaient des rituels associés au sacrifice de chiens.

Il s’agit d’une pierre de taille monolithique, sculptée en forme de colonne avec le fût strié, élargi à la base en forme de plinthe, et couronné par un chapiteau ionique avec des volutes délicatement travaillées. Le chapiteau est relié au fût par une frise aux feuilles lancéolées, séparées par les stries. La partie supérieure du chapiteau représente une dépression quadrangulaire d’environ 11 cm de côté et de 4 cm de profondeur. Les volutes de la partie postérieure semblent inachevées, tandis qu’une grande partie des stries sont endommagées, sur la partie antérieure. L’ensemble mesure environ 62 cm de hauteur. La largeur du chapiteau est de 37 cm ; le diamètre du fût mesure entre 22 et 25 cm de diamètre, et celui de la plinthe est de 48 cm.

 

Il s’agit d’une pièce monolithique en forme de colonne, sculptée sur du marbre blanc. La colonne est couronnée d’un chapiteau de style ionique classique, avec de petites volutes, mieux développées sur la partie antérieure et inachevées sur la partie postérieure. Le fût a une section circulaire striée, et s’élargit par la partie inférieure, formant ainsi une plinthe large et délicate. La partie haute du fût, entourant la totalité du périmètre, présente une moulure décorée de motifs végétaux de feuilles lancéolées situées entre les stries séparées par les arêtes du fût et encadrées de perles. La partie avant du fût est fortement endommagée sur la partie basse des stries. Cette usure pourrait être expliquée par un frottement continu de la pièce, par un usage cultuel, un phénomène comparatif observé sur les piliers qui soutiennent une statue de la Vierge Marie. Le point zénithal présente une dépression centrale quadrangulaire, et des traces incisives sont visibles sur la partie non dépressive, dont certaines sont très profondes. Elles ont été interprétées comme des coups de hache et de couteau.

Les analyses pétroglyphiques ont déterminé la pierre comme étant du marbre pentélique, originaire d’une carrière proche de la ville d’Athènes et exploitée dès le VIe siècle avant J.-C. C’était le marbre le plus utilisé dans les constructions de l’acropole, et également dans des éléments architecturaux et sculpturaux, jusqu’au moment où les Romains commencèrent à utiliser le marbre de Carrare (moitié du IIe siècle av. J.-C. aC). Le marbre pentélique était parvenu en grandes quantité à Empúries, où plusieurs pièces ont été documentées, comme la statue d’Esculape. Il ne serait pas surprenant que la pierre d’autel de Pontós y soit parvenue par ce moyen et ait été réutilisée à des fins spirituelles.

La pierre d’autel a été retrouvée détruite dans la pièce principale de la maison 1 de l’établissement agraire, une grande maison de campagne aux modules architecturaux hellénistiques constituée de huit chambres et de deux cours intérieures, dont l’une d’elles était précédée par un vestibule à porche donnant lieu à la pièce principale. Les fragments de la pierre d’autel ont été retrouvés répartis autour d’un grand foyer situé au centre. D’autres éléments liés au culte ont été retrouvés dans cette pièce. Ils sont probablement en rapport avec des actes de purification, de libation et de sacrifice d’animaux. Il convient de mentionner les nombreux restes de chiens avec des traces de couteaux et d’écartèlement, avec des altérations thermiques montrant que le chien a été sacrifié puis consommé, ce qui fait penser que la pierre d’autel a été utilisée comme support principal pour le sacrifice de ces animaux. Cette situation est un cas ponctuel dans la vie du site archéologique. Elle précéda une offrande sanglante de remerciement aux divinités de l’agriculture, de la sécheresse et de l’amour, qui s’achevèrent dans un grand banquet où, outre les chiens, d’autres animaux domestiques étaient consommés,

comme des bœufs, des agneaux, des chèvres et des porcs. Le mélange de restes de chiens avec des animaux domestiques afin qu’ils soient consommés lors d’une fête signifie l’importance du chien comme l’un des animaux les plus proches de l’homme, celui qui a partagé avec lui les lieux de vie et parfois la tombe. De plus, le chien est lié aux divinités souterraines et aux cycles des cultures et de l’agriculture.

Cet usage cultuel d’une pierre de taille, en forme de colonne avec chapiteau, lié à des sacrifices sanglants, n’est pas habituel. Des scènes picturales de sacrifices d’animaux domestiques sont représentées sur de nombreux récipients céramiques attiques aux figures rouges, avec la représentation d’une pierre d’autel en forme de colonne et parfois avec des chapiteaux en volutes, qui sert de table de sacrifice. Cette documentation si évidente et intéressante écarte toute autre interprétation qui mette en question la pierre d’autel de Pontós en tant que probable piédestal pour une statue ou support d’autel.

Peu après ce banquet rituel, les habitants de Pontós abandonnèrent les lieux après quatre siècles et demi d’occupation. Cependant, la pierre d’autel avait été détruite auparavant, pour éviter de futurs carnages. C’était l’époque où les Romains contrôlaient librement les terres de l’Empordà, au début du IIe siècle av. J.-C.

Enriqueta Pons

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