Cuivre
2.300-1.800 av. J-C
Girona (Gironès)
Au début de l’année 1930, au tout début de la construction de la Clinique Girona (rue Joan Maragall 26, Gérone), un objet qui est encore le seul en son genre en Catalogne, a été localisé. Il s’agit d’une arme, une hallebarde en cuivre. La feuille est triangulaire et allongée, avec un nerf central épais et trois rivets de fixation disposés de façon triangulaire, dont deux ont été conservés. Elle mesure 244 mm de long, 70 mm de largeur maximum et 9 mm d’épaisseur maximum. Elle a été trouvée hors contexte (non conservé ou non observé).
Elle a rejoint le musée en 1937 et a été exposée pour la première fois en 1943, dans la Salle de préhistoire qui venait d’être inaugurée, située au cœur de Sant Pere de Galligants. À cette occasion, la hallebarde a été présentée cette même année. Elle était considérée à l’époque comme un poignard d’origine argarique. La culture d’El Argar se déploya lors du Bronze ancien dans les provinces actuelles d’Almeria, Grenade et Murcie, et s’étendait jusqu’au sud du Pays Valencien, touchant même certaines zones de l’Andalousie intérieure et de la Mancha.
Il avait été ensuite démontré clairement qu’il ne s’agissait pas d’un poignard mais d’une hallebarde, par sa poignée transversale suggérée par les rivets. Il fut également établi de façon définitive qu’elle n’avait rien à voir avec la culture argarique et que des pièces typologiques similaires ont été retrouvées dans la zone atlantique, dans les îles britanniques, en France et jusqu’au nord du Portugal, bien qu’il n’ait pas encore été précisé quel était le modèle le plus proche. Des analyses récentes ont montré que le cuivre de cet objet contient de petites doses d’arsenic, de plomb et d’argent. L’un desrivets contient également de l’antimoine et de l’étain. La datation de la hallebarde remonte au Bronze ancien, entre 2300 et 1800 ans avant J.-C. environ.
La feuille de hallebarde du Musée archéologique de Gérone est une pièce exceptionnelle en raison de sa signification chronologique et culturelle, de son état de conservation et de sa rareté. Elle a été trouvée en 1930, lors des travaux de construction de la maison située au numéro 26 de la rue Joan Maragall de Gérone.
Il s’agit d’une feuille métallique en forme de losange, constitué par deux triangles très inégaux. Le plus grand, la feuille de la hallebarde proprement dite, est allongé, renforcé par un nerf central épais et à la section arrondie qui arrive presque jusqu’à la pointe. Le triangle opposé, plus plat, petit et court, est la languette qui servait à emmancher la feuille à la hampe. Pour ceci, il comporte trois trous qui devaient laisser passer les clous ou rivets, dont deux ont été conservés. Il mesure 24,3 cm de long et 7 cm de large, maximum. Les clous mesurent 1,8 cm d’épaisseur.
Elle est en cuivre, avec de petites proportions d’arsenic, d’argent et de plomb. Les clous sont également en cuivre, mais contiennent de l’antimoine et de l’étain, et pas d’arsenic. La feuille a été réalisée en versant le métal liquide dans un moule, puis le modelage a été achevé à la forge, à froid ou à chaud. Les clous ont été réalisés à part, avec un minéral d’une autre fonderie.
La hallebarde d’époque préhistorique consistait simplement en un triangle allongé en métal, relié à une hampe courte. C’était une arme offensive qui pouvait être manipulée à une ou deux mains, prévue pour donner des coups et enfoncer. Les feuilles les plus anciennes étaient simplement plates, puis on y rajoutait un nerf central comme renfort. La hampe était généralement en bois, d’environ un mètre de long, bien qu’on en ait retrouvé en métal en Europe du nord et centrale.
Les feuilles en métal, comme la nôtre, sont considérées comme des feuilles de hallebarde, bien qu’il ne soit pas facile de les distinguer des feuilles de poignard. Ces dernières étaient également triangulaires et larges, et étaient également unies par des rivets à un manche, mais dans ce cas, de forme allongée. Les feuilles de hallebarde étaient placées selon un angle légèrement aigu avec la hampe. C’est pour cette raison que les trous des rivets des hallebardes ne sont pas symétriques. C’est le cas de la hallebarde de Gérone.
Les hallebardes étaient une arme caractéristique de l’âge du bronze ancien et ont été retrouvées partout en Europe. Elle est également représentée dans des gravures rupestres, des pays nordiques jusqu’à l’Atlas et au Sahara, ainsi que les pétroglyphes galiciens, dans les Alpes. Selon les lieux, ces représentations montrent la feuille, la hallebarde entière ou les personnages qui la portent à la main.
Outre être une arme offensive, c’était également un objet symbolique pour signaler la catégorie sociale de la personne qui la possédait, comme c’est le cas actuellement avec certains ordres militaires, qui portent les hallebardes comme une fonction ornementale symbolique.
Dans la Péninsule ibérique, les hallebardes sont très présentes dans la civilisation de l’Argar (2200-1550 av. J.-C.), qui s’étendait en Andalousie orientale, à Murcie et à Alicante. On en a retrouvé dans des tombes, pour indiquer que la personne enterrée était un guerrier. Dans le reste de la Péninsule, on en a retrouvé des exemplaires isolés. Celle que nous mentionnons est la seule qui a été retrouvée en Catalogne.
La forme de la feuille de Gérone correspond à des types de hallebardes atlantiques. Bien qu’elle soit en cuivre et pas en bronze, sa forme la rapproche plus de l’âge du bronze ancien (230-1850 av. J.-C.) qu’au chalcolithique.
La hallebarde caractéristique de l’époque médiévale et moderne était très différente. Elle servait à percer et à couper. La hampe mesurait environ deux mètres de long, avec une sorte de hache sur le côté et une pointe à l’extrémité. Elle mettait en valeur le bataillon d’infanterie qui la portait, car elle permettait de faire face à la cavalerie. Certaines étaient très ostentatoires et servaient, de même que pendant la préhistoire, uniquement d’armes de prestige. Les hallebardiers de la Garde Royale Espagnole ou de la Garde Suisse du Vatican l’utilisent encore dans cette fonction.
Narcís Soler